Une ruche qui attend votre implication

26 Mar, 2013 | L'ECOLOGIE HUMAINE

rucheLa publication d’une tribune dans le journal La Croix a ouvert la voie à de nombreux débats stimulants, parfois vifs, qui se sont engagés entre des composantes diverses concernées par cette proposition. Ces débats appellent certaines précisions sur notre propos.

Le mouvement écologique est né d’une prise de conscience des impacts graves et irréversibles des activités humaines sur la nature. Lorsque nous disons “activités humaines“, nous pensons à un certain mode de développement industriel et technologique qui s’est développé d’abord en Europe depuis environ deux siècles, puis dans le monde à travers différents systèmes politiques et aujourd’hui essentiellement dans un contexte libéral et financier mondialisé.

UNE REMISE EN CAUSE NÉCESSAIRE

Nous croyons toujours que la réconciliation entre la société contemporaine et la nature reste possible

Pour autant, le projet est-il de protéger la nature contre l’homme ? Lorsque nous affirmons que : “Nous croyons toujours que la réconciliation entre la société contemporaine et la nature reste possible“, nous voulons affirmer notre conviction qu’il est possible d’inventer et d’expérimenter de nouvelles formes de vivre et de décider ensemble au plan local, national et international pour favoriser une relation harmonieuse entre les communautés humaines, leurs activités et la nature. En disant cela, nous sommes conscients des profondes remises en cause de nos modes de vie, de nos formes de confort, des formes de production et de consommation qui les caractérisent aujourd’hui. Mais notre conviction se fonde aussi sur l’existence de nombreuses innovations et initiatives sociales, professionnelles, coopératives, artistiques, inventions de nouvelles formes d’habitat, de production, d’échange, de mise en commun qui contribuent à renouveler la façon dont nous pouvons penser un mode de vie contemporain en harmonie avec la nature.

Dès les débuts du développement industriel, les structures sociales et économiques traditionnelles ont été profondément ébranlées affectant gravement les conditions de vie et la dignité de nombreux êtres humains. Aujourd’hui, nous constatons encore chaque jour l’impact du développement de l’économie libérale mondialisée sur les communautés humaines dont la prise en compte rentre pleinement dans le champ de l’écologie humaine.

PRENDRE LA MESURE DE LA MENACE QUI PÈSE SUR L’HOMME

L’écologie humaine que nous souhaitons promouvoir veut en particulier et de façon spécifique mettre l’accent sur la menace qui pèse aujourd’hui sur la nature de l’homme. Cette fois-ci, la menace ne concerne pas seulement les plus vulnérables des hommes mais aussi l’humanité. C’est cette prise de conscience qui nous semble être en jeu dans le mouvement actuel en France, au delà du contexte politique et législatif. Lorsque les hommes ont mis le pied sur la Lune, ils ont tout à coup vu la Terre, notre biosphère, comme quelque chose de petit dans l’univers, de fragile. Aujourd’hui nous prenons conscience que toutes sortes de choses qui étaient implicitement attachées à l’idée d’humanité disparaissent silencieusement ; comme certains papillons qui ont progressivement disparu.

Il nous semble important d’affirmer que cette menace, ces risques qui pèsent sur l’humanité sont la résultante d’un ensemble de micro-décisions et macro-décisions, souvent indépendantes, qui font que progressivement la notion d’humanité est altérée, remise en cause. Nous devons tous nous interroger sur notre façon de vivre, sur nos priorités, sur nos responsabilités à cet égard.

L’humanité est une réalité individuelle et collective. Nous ne pouvons pas seulement interroger nos désirs personnels, nous devons tous nous interroger à l’échelle de notre dimension d’humanité pour identifier ce que nous devons respecter et préserver ensemble pour sauvegarder cette humanité authentique.

Nous devons faire ensemble un état des lieux, nous interroger sur ce qu’est pour nous l’humanité, accueillir cette réalité qu’est l’humanité avec émerveillement (certains diront gratitude), nous interroger sur les conditions d’une humanité authentique, ce qui est durable dans cette notion et ce qui est plutôt le fait du temps, des préjugés. Il faut discerner ce que nous souhaitons préserver et transmettre aux générations qui nous succéderont. En particulier, dans une époque marquée par l’idéologie libérale et individualiste, nous devons nous interroger sur ce qui est commun dans la notion d’humanité. L’humanité est une réalité individuelle et collective. Nous ne pouvons pas seulement interroger nos désirs personnels, nous devons tous nous interroger à l’échelle de notre dimension d’humanité pour identifier ce que nous devons respecter et préserver ensemble pour sauvegarder cette humanité authentique. En tant qu’être humain, nous portons une responsabilité commune, nous avons la garde de l’humanité, nous ne pouvons pas nous contenter d’observer ce qui se passe et de constater passivement ce changement, nous devons prendre nos responsabilités. Il s’agit de s’opposer à l’obscurcissement de l’humanité.

Notre propos à ce stade n’est pas d’imposer une voie ou une autre (la décroissance par exemple) mais de créer les conditions d’un débat ouvert entre différentes composantes sociales, différents écoles de pensée, différents groupes de recherche.

REPENSER LA TECHNIQUE

…repenser la technique“ pour mettre celle-ci au service de l’homme au rebours de la situation présente qui voit l’homme asservi par le développement technique.

Il ne s’agit pas non plus de prendre position pour ou contre la technique. Nous souhaitons au contraire affirmer la nécessité de “repenser la technique“ pour mettre celle-ci au service de l’homme au rebours de la situation présente qui voit l’homme asservi par le développement technique. Mais ceci nous conduit d’abord à interroger la justification de tel ou tel développement technique et les conditions de sa contribution au bien commun. Ce qui doit d’abord être questionné c’est le projet de ceux qui cherchent à imposer un développement technique pour servir des enjeux qui n’ont rien à voir avec le bien commun.

VERS UNE NOUVELLE ÉCOLOGIE

Lorsque nous indiquons que “Dès lors que l’homme n’est qu’un matériau (…) les politiques environnementales en viennent à protéger la nature au détriment de l’homme“, nous souhaitons souligner l’ambiguïté du statut de l’homme et de l’humanité dans le mouvement actuel de l’écologie. Il est bien connu que certains courants, comme celui de l’écologie profonde, mettent la priorité sur la défense de la biosphère sans donner de statut particulier à l’homme, et même, dans certains cas, voient dans l’homme la principale menace contre la nature. Par ailleurs, les politiques publiques environnementales se situent dans une logique d’instrumentation de l’action humaine qui vise à orienter cette action humaine par la contrainte réglementaire, ou par l’incitation économique (où chacun agit dans son intérêt privé pour servir une priorité qui est déterminée par d’autres). Dans ces politiques, il ne s’agit pas de créer les conditions pour que les hommes reconnaissent la nature comme un bien commun et agissent individuellement et ensemble pour en prendre soin. N’est-ce pas d’ailleurs la même logique qui risque de conduire la loi Peillon à promouvoir une véritable morale d’Etat qui est censée se substituer à la morale commune dans une défiance profonde vis-à-vis des parents et des valeurs qu’ils souhaitent transmettre à leurs enfants. Ce n’est peut-être pas son intention, mais c’est ce que certains en déduisent.

“LA PUISSANCE NAIT DU RASSEMBLEMENT DES HOMMES”

Le courant de l’écologie humaine dont nous accompagnons la naissance nous semble devoir se situer dans une logique coopérative. Nous souhaitons d’abord lancer un appel à l’initiative de pensée, de dialogue, d’action, locale, nationale, internationale, sectorielle, globale, de tous ordres. Comme le dit Hannah Arendt : “La puissance nait du rassemblement des hommes“. Il faut d’abord nous rassembler et construire ce qui nous est commun. Dans cette première étape d’état des lieux, il ne s’agit pas de chercher un consensus mais de croiser la pluralité des regards, des sensibilités des différentes composantes humaines qui souhaiteront s’engager dans ce mouvement, sans préjudice de leur propre position. L’image est celle d’une ruche neuve et vide posée par l’apiculteur à côté d’un essaim sauvage qui vient alors s’installer et s’auto-organiser dans cet espace.

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