Choisir la vie ? 2 recommandations !

14 Juin, 2018 | Form'action Cap 360

Dans le cadre de la dernière soirée de Form’action Cap 360° 2018, sur le thème “Choisir la vie !”, Gilles Hériard Dubreuil, co-initiateur du Courant pour une écologie humaine, propose deux recommandations pour assurer le meilleur discernement possible dans les choix qui émergent au quotidien.

Gilles Hériard Dubreuil : « Deux recommandations pour choisir la vie.

Passer par l’Homme

La première recommandation pour choisir la vie est de passer par l’Homme. Peut-être certains se souviennent-ils de la saison 1 de cette form’action Cap 360°. Nous avions travaillé sur tous les métiers, toutes les activités humaines et notamment sur l’architecture. Peut-être vous rappelez-vous du travail de Lucien et Simone Kroll, qui ne sont pas des architectes comme les autres. Pourquoi ? Parce que dans leur travail d’architecture, ils passent par les hommes, ils ne se contentent pas de concevoir des objets sublimes qui satisfont leur ego. Ils font en sorte de travailler avec des communautés humaines pour aménager des espaces aimables. Par exemple, sur une barre infâme des années 70, que tout le monde voudrait détruire à coups d’explosifs, Lucien Kroll estime qu’il ne faut surtout pas la faire disparaître de cette manière : quand on la fait exploser, les gens qui ont vécu toute leur vie dedans pleurent en voyant s’effondrer ce qui a été leur cadre de vie. Lucien Kroll ajoute que ces barres d’immeubles sont criminogènes – cet environnement n’est pas favorable aux personnes qui y habitent. Alors comment fait-il ? Il convie les parties prenantes – habitants de l’immeuble, associations, syndics, etc. – et leur propose de réfléchir : quels sont leurs projets ? Dans quel cadre veulent-ils vivre ? Qu’est-ce qu’ils veulent bâtir comme activités ? Il leur donne des mousses, du carton et leur demande ce que pourrait être un aménagement de l’endroit où ils vivent. Puis il s’installe dans un coin et parfois intervient en disant que telles et telles choses ne sont pas faisables, car on ne peut déplacer une poutre maîtresse, un mur porteur… Il propose différentes alternatives pour atteindre l’objectif visé, et progressivement, on voit émerger un projet humain et aimable. C’est amusant de voir la manière dont les plans nous font passer d’une barre d’immeuble invivable à quelque chose qui devient presque une rue de village. Ainsi, Lucien Kroll reconstitue une manière de vivre en mettant une communauté humaine en action.

Première recommandation donc, passer par l’Homme. J’en viens d’ailleurs également à cette conclusion à travers mon expérience professionnelle, dans les situations accidentelles et post-accidentelles : si l’on veut reconstruire des modes de vie sur des lieux dévastés, il faut passer par l’Homme.

Restaurer le lien homme-nature

Seconde recommandation essentielle pour choisir la vie : comprendre de quoi il est question quand on parle d’écologie. Ce n’est pas d’abord une question de protection de la nature mais, avant tout, une question ontologique. Il faut interroger cette relation entre l’homme et la nature amenée par la modernité qui place l’homme à distance. Lorsque Philippe Descola, grand anthropologue français, part en Amazonie, il découvre un monde riche en forêts et en biodiversité. Et il réalise que le fond même de cette biodiversité résulte de 8000 ou 9000 ans d’interaction entre l’homme et cette forêt : l’homme ouvre des clairières ; de nouvelles espèces végétales ou animales s’y installent alors, toute une biodiversité s’installe. Puis, ce sol s’appauvrit et la fertilité s’effondre. Que fait alors l’Homme ? Il plie bagage et va ouvrir une clairière ailleurs. Alors, la clairière se referme, la forêt se réinstalle différemment, avec une biodiversité nouvelle. Il existe donc une étroite dépendance, solidarité, de l’homme à ce milieu vivant, à cette nature. C’est d’ailleurs ce que nous transmet la tradition judéo-chrétienne avec l’idée d’un Eden dans lequel l’homme est introduit. Dieu plante le jardin et confie à l’homme la double fonction de le cultiver – c’est-à-dire se mettre à l’écoute, dans une relation d’altérité, comme le font aujourd’hui, par exemple, les gens qui font de la permaculture, à l’écoute d’un sol vivant – et le garder, c’est-à-dire faire attention à ce jardin planétaire dans lequel nous vivons désormais, dont certaines parties ont été touchées, gâtées, des terres désolées que l’homme doit réensemencer et rendre, à nouveau, vivantes.

Voilà donc deux propositions pour “choisir la vie” : passer par l’homme et refaire l’unité entre l’homme et la nature. »

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