L’économie vivante, selon Patrice Valantin

13 Oct, 2017 | Non classé

Patrice Valantin a une première carrière d’officier – à la Légion étrangère, notamment – puis poursuit sa carrière professionnelle en tant qu’entrepreneur. Fondateur de l’entreprise Dervenn en 2002, spécialisée en travaux et études de génie écologique, il la quitte en 2016 pour créer l’entreprise Reizhan, dont l’objectif est simplement la révolution par l’économie vivante.  Témoignage.

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“Une première carrière d’officier m’a appris la fragilité des sociétés en particulier lors du conflit yougoslave, la réalité de la nature humaine dans sa haine et sa violence, mais aussi, ayant eu l’honneur de commander les meilleurs soldats du monde, la foi en l’homme par l’honneur, la fidélité, le courage, la générosité et le dépassement. Cet apprentissage dans le sang est déterminant pour mes projets d’aujourd’hui, car la Paix est la principale cause pour laquelle combattre.

Après quinze années, j’ai souhaité servir la France par d’autres moyens. Nous étions en 2000, et la suspension du Service National m’incitait à créer un centre de formation qui pourrait assurer la continuité du rôle social de cette vieille institution, pour permettre à de jeunes volontaires de passer avec sérénité le cap parfois périlleux de l’âge adulte. Ma triple expérience de chef scout, de cadre du service militaire et surtout d’officier de Légion étrangère m’a alors inspiré une école du savoir-être basée sur la vie en nature. N’ayant trouvé aucune aide dans les pouvoirs publics de l’époque, j’ai donc opté pour la vraie liberté en ne comptant que sur mes propres forces, et devenant entrepreneur. J’ai fondé Dervenn en 2002, entreprise de travaux en espace naturel. Les débuts furent un peu rudes, car on ne passe pas sans effort du commandement d’une centaine de guerriers surentraînés et encadrés au poste d’ouvrier avec seulement deux compagnons ! Dervenn s’est transformé en quelques années en une belle entreprise de génie écologique d’une trentaine de personnes, disposant d’un pôle travaux équipé d’engins et d’outils adaptés aux milieux sensibles accompagné par un bureau d’études performant. Dervenn a ainsi développé une vraie expertise sur les écosystèmes et les services qu’ils produisent, la compréhension des interrelations entre les activités humaines et les systèmes vivants et le déploiement de solutions opérationnelles pour développer la biodiversité sur tous types de milieux, ruraux, forestiers ou agricoles. L’école du savoir-être, Irvin, verra finalement le jour en 2015.

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J’ai découvert la merveilleuse richesse et la complexité des systèmes vivants, indispensables à notre propre vie et paradoxalement, leur destruction implacable par notre société égoïste et cupide, avec les enjeux sociaux et économiques que cela représente. Mon apprentissage dans la sueur et la boue, sans aucune approche dogmatique ou politique de l’écologie, m’a incité à chercher plus loin.

Ma frustration ne cessait de grandir en raison de l’hypocrisie de nos interventions en génie écologique, qui consistaient à réparer les destructions générées par l’activité humaine, sans jamais rattraper le rythme effréné de la dégradation, et sans aucune action sur les causes elles-mêmes. Ces bonnes actions ne servaient que la bonne conscience des décideurs qui continuaient paisiblement le massacre de la vie.

Nous avons ainsi créé en 2008 un pôle conseil et stratégie au sein de Dervenn, dont la finalité était l’évolution des modèles économiques et de la gouvernance territoriale afin de réintégrer les activités humaines dans le fonctionnement des systèmes vivants. Cette expérience nous a enseigné que la situation actuelle n’est pas une fatalité, et qu’il est tout à fait possible de reprendre un mouvement compatible avec le bien commun, sur les plans économiques, écologique ou social. L’origine profonde des tensions actuelles est simple : un modèle économique dont la finalité n’est que la maximisation du profit pour chaque acteur économique, c’est-à-dire la cupidité, ce qui a séparé le fonctionnement de nos sociétés des réalités biologiques et des relations avec les systèmes vivants. Pour sortir de cette impasse, il suffit de développer une stratégie macroéconomique qui s’abstrait de l’économie financière. En raison des résultats positifs de ce modèle, j’ai quitté mon entreprise Dervenn fin 2016, dans ses composantes travaux et études, pour conserver le développement de l’économie vivante, seul avenir réaliste. J’ai ainsi créé l’entreprise Reizhan (qui signifie « adaptation » en breton), dont la finalité est la révolution économique, d’abord locale puis mondiale, par un changement radical de mode de pensée et d’action, pour réintégrer ainsi nos sociétés dans le fonctionnement des systèmes vivants. L’action de Reizhan, issue de huit années d’expérimentation, s’appuie sur quatre piliers :

  • La contemplation, la connaissance et la compréhension des systèmes vivants pour les entreprises et les territoires pour de nouvelles voies de création de valeur (bio-inspiration et stratégies de transition),
  • La formation à l’économie vivante par l’immersion naturelle, en particulier des cadres de haut niveau,
  • Le changement de regard sur la vie par des outils pédagogiques innovants connectés aux nouvelles technologies,
  • Le développement de l’économie vivante par la mise en œuvre de bourses locales, de clusters économiques et de marchés territoriaux pour libérer les territoires de la pression financière et spéculative. La première cible consistera à se réapproprier la gestion agroalimentaire qui doit revenir au service de l’homme. L’objectif est à terme de reprendre la gestion d’une bonne partie de l’économie financière mondiale.

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Nos expériences et surtout nos rencontres des dernières années nous incitent à l’optimisme pour cette aventure entrepreneuriale. L’avenir appartient aux hommes déterminés qui sont capables de sortir du modèle actuel pour ne plus prendre part à ses vices, et bâtir la Paix par l’espérance d’un monde à construire ensemble. Les bonnes pratiques et les solutions technologiques ou politiques n’ont aucun sens si l’on ne revient pas à l’origine de nos maux. Seuls les systèmes vivants, basés sur la relation et la diversité, le service et la complémentarité, peuvent être une référence fiable pour le monde de demain. Notre jeunesse, quelle que soit son origine culturelle, n’attend qu’une lumière pour se mettre en marche. Alors partons à l’assaut de la Vie !”

 

En savoir plus sur Patrice Valantin

« Le centre de formation Irvin imaginé il y a dix-sept ans et qui est maintenant opérationnel est une composante essentielle de la stratégie : il a pour vocation à former la jeunesse pour le don, le service et l’engagement au profit du bien commun, c’est-à-dire former des bâtisseurs d’avenir. »

Sources :

 

Je soutiens le Courant pour une écologie humaine

 Générateur d’espérance