Liberté et vérité : la place de l’homme

10 Juin, 2013 | FAMILLE, SOLIDARITES & SOCIETE, SOCIETE

Liberté véritéQu’est-ce que l’homme ? Question philosophique par excellence, car elle rejoint ce qui nous touche le plus directement : nous-mêmes.

Un certain modernisme tend à penser que l’homme est ce qu’il choisit d’être : ainsi de Sartre qui déclare que l’homme est un «projet», ou de Nietzsche qui voit dans l’homme une volonté de puissance. Ces concepts, profondément pensés et réfléchis, méritent d’être compris, creusés et demandent du temps.

Pourtant ils mettent (volontairement) de côté un fait longtemps acquis. Ce que nous sommes précède à la fois ce que nous en connaissons et la façon que nous avons d’exister.

DEUX DÉFINITIONS DIFFÉRENTES DE L’HOMME

Ce sont deux conceptions diamétralement opposées : d’un coté nous pensons l’homme dans sa liberté, comme maître et auteur de sa propre vie. Ses actes créent son être. De l’autre, on s’appuie sur ce mot de Thomas d’Aquin, s’appuyant lui-même sur Aristote : « La vérité est conformité de notre intelligence à la réalité. »

« Aujourd’hui, dans notre société, cette opposition se retrouve partout et fait la joie de l’opinion publique, trop rapidement satisfaite d’une telle simplicité »

Deux maîtres mots qui donnent deux définitions différentes de l’homme : d’un côté nous avons le primat de la liberté humaine. Affranchissement des doctrines religieuses et philosophiques extérieures au sujet, exaltation de la liberté individuelle, primat de la conscience sur l’ordre moral.

De l’autre, primat de la vérité, acceptation de valeurs qui transcendent notre appétit humain, humilité devant la vie, la mort, le corps et, de manière générale, devant ce qui est donné.

Aujourd’hui, dans notre société, cette opposition se retrouve partout et fait la joie de l’opinion publique, trop rapidement satisfaite d’une telle simplicité. Ainsi de l’opposition entre « pro-life » et « pro-choice » aux Etats-Unis, du débat entre pro-mariage gay et anti-mariage gay en France, etc.

Vérité et liberté s’opposent-ils donc autant? Est-il possible d’accepter une vérité révélée, sans pour autant perdre sa liberté ? Est-il possible pour un homme, privé de tout lien avec une quelconque transcendance, de pouvoir approcher la vérité par lui-même ?

Tant que les hommes ne sauront répondre à cette question, les débats resteront des oppositions politiques. Qu’elles soient violentes ou non, elles peineront à faire avancer la société. Désirer en effet fonder la société de manière juste sans en passer par une réelle interrogation sur nous-mêmes ne restera alors que du vent.

Il faut aujourd’hui repenser ensemble ces catégories qui divisent l’homme, ne sachant plus que penser. Sans quoi l’homme ne sera jamais que l’ombre de lui-même. Sans quoi notre liberté ne saurait nous conduire à un vrai bonheur social et personnel. Sans quoi la vérité ne saurait être à nos yeux qu’un tyran à abattre.

LIBERTE ET VERITE

Le mot d’écologie humaine signifie implicitement que l’homme est un donné à respecter. Qu’on ne peut pas faire ce que l’on veut de nous-mêmes. En alignant une vision de l’homme sur le concept d’écologie, elle en fait non pas un objet mais une réalité qui ne dépend pas que de notre ego. Aussi terrible soit cette pensée pour ce dernier, elle nous permet cependant de nous libérer d’un drame profond. Cette opposition de la liberté à la vérité cache en effet un autre drame.

Liberté absolue, l’ego est une réalité solitaire. Désirant ce que je veux être, je ne peux occulter cette nécessité quasi ontologique dans le cœur de l’homme : il n’est pas bon que l’homme soit seul. « Que voulons-nous être? » et « que sommes-nous ? » sont une seule et même question.

Il n’est pas bon que l’homme soit seul est une réponse quasi instinctive, dont nous ne pouvons nous passer sans dépérir.

Le vivre ensemble implique la liberté de chacun. Mais il implique aussi la vérité de chacun avec lui-même et avec les autres. Le mensonge, contraire de la vérité, est aussi l’ennemi de la liberté. Le mensonge dans une relation détruit la liberté de chacune des parties. Au delà des règles, c’est le principe même du vivre ensemble qui exige de lier la liberté à la vérité.

En ce sens, vérité révélée et liberté personnelle sont les deux poumons de notre âme. À l’image d’une relation amoureuse où vont de pair la révélation soudaine que l’autre est bon pour moi et la décision libre de me confier à lui, la relation que nous entretenons avec nos pairs se construit en s’appuyant sur ces deux poumons. Par extension, le regard que nous portons sur le corps humain, sur la terre, sur le travail, sur la valeur de nos actes, a besoin de vérité et de liberté.

Ainsi peut être dépassée, du moins en principe, l’opposition entre la liberté humaine et la vérité humaine.

« Les questions éthiques qui divisent les français sur des questions politiques fondamentales ne peuvent se résoudre par la force mais par la recherche de la vérité. »

Mais il nous faut aller plus loin. Une telle analogie avec la relation amoureuse a pour principal intérêt de réconcilier liberté personnelle et vérité dans le seul domaine politique. Ce qui se joue est la propre unité de l’homme avec lui-même. Nous ne pouvons être libres sans accepter ce que nous sommes. La contradiction entre acceptation et liberté n’est qu’apparente. Elle se résout, toujours à l’image de la relation amoureuse, dans le choix. Choisir l’autre c’est l’accepter librement. Si souvent autre à moi-même, je deviens ce que je suis en m’acceptant librement. Et je ne peux accepter librement ce que je suis qu’en découvrant, dévoilant qui je suis.

Les questions éthiques qui divisent les français sur des questions politiques fondamentales ne peuvent se résoudre par la force mais par la recherche de la vérité. L’idéologie existentialiste de l’homme comme liberté absolue semble alors n’être qu’une façon de se voiler la face, pour mieux s’illusionner d’une fausse liberté.

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