Et si on se regroupait pour sortir une famille amie de la rue ? C’est la magnifique idée de l’association Cent pour un Toit. Bernadette Perraud et Jean-Marc Jourdan, qui agissent ensemble dans l’Ain, racontent leur action, génératrice de joie et d’humanité.
Il y a actuellement 68 associations “Cent pour un Toit” en France qui travaillent sur le même principe : si 100 donateurs s’engagent à verser 6 € minimum par mois pendant au moins deux ans, on peut alors louer un logement et prendre en charge tous les coûts lié à ce logement. Ainsi une une famille qui est privée du droit d’accès au logement peut être hébergée.
À propos de Bernadette Perraud et Jean-Marc Jourdan
Bernadette Perraud, enseignante à la retraite, est adhérente de l’association Cent pour un Toit 01 depuis sa création en 2016.
Jean-Marc Jourdan est également adhérent depuis 2016 et fait partie du collège (qui regroupe les administrateurs) de Cent pour un Toit 01.
Comment est née l’association Cent pour un Toit 01 ?
La création de cette association fait suite à l’engagement d’un collectif de solidarité qui soutenait les migrants à la rue. Dans ce cadre, plusieurs personnes de notre territoire hébergeaient des familles, parfois pour quelques jours, parfois pour une durée plus longue. De là a germé l’idée : et si on se cotisait ensemble ? Cela nous permettrait de louer un appartement pour ces familles que nous connaissions et aimions !
Ca a tout de suite fonctionné : ça correspondait à un vrai besoin sur le territoire.
De fait, le moteur de cette histoire, c’est l’humain : ce sont de vraies personnes, que l’on connaît en chair et en os, et dont on sait qu’elles vivent dans des conditions difficiles (à la rue, dans des squats, etc.). C’est pour elles que l’on s’organise et trouve des solutions d’hébergement.
Notre engagement repose sur la défense de l’accueil inconditionnel et digne pour tout être humain, en particulier des enfants et leurs parents.
Comment fonctionne Cent pour un Toit ?
Il y a actuellement 68 associations Cent pour un Toit en France qui travaillent sur le même principe : si 100 donateurs s’engagent à verser 6 € minimum par mois pendant au moins deux ans, on peut alors louer un logement et héberger une famille en situation de précarité.
En revanche, nous ne pouvons pas parler globalement de Cent pour un Toit : sur chaque territoire, l’association a ses particularités, son histoire. Nous fonctionnons en réseau et pouvons facilement nous entraider si besoin.

À quoi s’engage-t-on quand on veut faire partie de l’aventure Cent pour un Toit ?
Il y a des niveaux d’engagement très variés.
- On peut donner tous les mois au minimum 6€ pendant deux ans et regarder de temps en temps les informations sur le site de Cent pour un Toit.
- On peut donner et connaître l’une des familles. Souvent, alors, l’aide n’est plus seulement financière : visites régulières, soutien moral parfois même administratif si l’on a des compétences en droit.
Ce sont des engagements qu’il faut tenir sur deux ans parce que nous devons assumer l’hébergement des familles : on ne peut pas se permettre de les remettre à la rue ; c’est moralement et éthiquement impossible.
- Au bout de deux ans, on peut arrêter cet engagement. Nous constatons toutefois que les familles ont besoin de beaucoup plus de temps pour obtenir un titre de séjour. Nous demandons donc si les donateurs veulent bien continuer leur soutien. Et on peut également s’engager plus avant en rejoignant le collège, par exemple. À Bourg-en-Bresse, nous sommes 19 personnes dans le collèges. C’est nous qui faisons fonctionner l’association via l’organisation d’événement pour les familles, l’élaboration de newsletters régulières, etc.
Comment choisissez-vous les familles qui bénéficieront d’un logement Cent pour un Toit ? Avez-vous des critères de sélection ?
Dans l’Ain, nous accueillons majoritairement des couples avec enfants. Mais il arrive également que des femmes seules avec enfants, voire de jeunes majeurs en colocation puissent devenir bénéficiaires de notre aide.
Vous l’imaginez bien : la difficulté n’est pas de trouver des familles, mais bien de faire le choix entre toutes celles qui ont besoin d’aide. On a essayé de trouver des critères, bien sûr, mais l’urgence de la situation s’avère bien souvent la priorité. Pour le reste, il y a :
- Le temps d’errance : depuis combien de temps la famille est à la rue ou dans des squats ? C’est un critère important pour nous parce que ça montre leur volonté de rester en France et parfois aussi l’impossibilité de rentrer chez eux.
- La connaissance de la famille : nous savons d’où elles viennent, quel est leur parcours et leur histoire.
- L’engagement associatif : souvent, pour faciliter leur intégration, on propose aux famille de s’engager dans des associations caritatives, quelles qu’elles soient. L’intérêt est de ne pas passer de longues journées à rester sans rien faire. Les familles qui acceptent de donner ce temps sont alors prioritaires pour nous.
Comment fait-on le choix d’une famille quand un logement se libère (Ce qui devient de plus en plus rare aujourd’hui, vu le contexte politique) ? Dans l’Ain, le collège se réunit mensuellement et décide collégialement de ce qui parait le plus juste. Le feeling et l’affect entre évidemment en compte !

Comment trouvez-vous les logements ?
Quand on a créé l’association, on n’avait pas mesuré la difficulté de trouver des logements. Un bailleur social nous avait assuré qu’il nous mettrait des appartements à disposition dès que l’association serait créée. Ca n’a finalement pas eu lieu !
Il a donc fallu se tourner vers le parc privé. On a alors eu la chance de tomber sur LE propriétaire qu’il nous fallait. Il proposait un petit immeuble de cinq appartements voué à la destruction. Les loyers étaient très bas. Nous avons passé un nécessaire coup de peinture et le tour était joué ! Nous avons pu accueillir ainsi nos premières familles.
Aujourd’hui, dans l’Ain, nous fédérons autour de 700 donateurs. Comme certains sont particulièrement généreux, nous pouvons accéder à 18 appartements et héberger près de 75 personnes, à peu près autant d’enfants que d’adultes. Et nous sommes identifiés sur le territoire comme d’excellents locataires !
Y a t-il une histoire qui vous a particulièrement touchée ?
Il y a cette enfant – elle avait huit ans à l’époque – qui a écrit un texte émouvant sur sa rencontre avec deux dames qui ont changé sa vie. Il s’agissait de deux bénévoles de Cent pour un Toit qui lui annonçaient que dès le lendemain, elles les emmèneraient dans un nouveau logement. La famille vivait depuis un an et demi dans un véritable bidonville : un immense hangar remplie de cabanes construites de bric et de broc. Et puis, un jour, grâce à ces deux bénévoles, elle a pu accéder, avec sa famille, à un logement plus décent.
C’est vrai que pouvoir faire ce type d’annonce est un moment très fort, c’est que du bonheur !
Heureusement qu’on a de belles histoires car il y a aussi des moments difficiles. Typiquement quand des familles frappent à la porte et qu’on doit leur dire qu’il n’y a rien de disponible…
Avez-vous un dernier message ?
Engagez-vous !
Allez chercher l’énergie des personnes invisibilisées : elles ont l’énergie et les solutions !
Allez à la rencontre des migrants, des familles, des voisins ! Discutez ! On apprend beaucoup quand on se rapproche des gens.
Et si vous voulez vous organiser sur votre territoire, n’hésitez pas à prendre contact avec nous – centpouruntoit01@gmail.com – nous pourrons vous aider à démarrer.

Découvrir le témoignage d’un bénéficiaire de Cent pour un Toit 01
Aller sur le site de Cent pour un Toit 01
Pour aller plus loin, lire l’article de Gaëtan de Royer : Le lobbying autrement