Lois et réglementations : et si on essayait la confiance ?

18 Oct, 2014 | ENVIRONNEMENT, HABITAT & ARCHITECTURE

On se plaint de l’accumulation des règlementations. Le domaine de la construction et de l’urbanisme n’échappe pas à la règle. Il est régi par 13 codes différents, dépendant de multiples ministères qui établissent des règles parfois incohérentes entre elles. Des solutions efficaces et de bon sens sont rendues impossibles, les coûts augmentent, l’application des normes peut conduire à des solutions absurdes qui vont à l’encontre des intérêts des utilisateurs.

Ces règles sont utiles pour veiller à la sécurité, à la santé, et éviter des abus. Mais on peut les simplifier sans remettre en cause ces objectifs.

UNE REGLEMENTATION FONDEE SUR LA DEFIANCE

Notre règlementation est trop souvent fondée sur une défiance vis-à-vis du monde professionnel, et donc sur la volonté de tout encadrer par des règles très précises. Une plus grande liberté d’adaptation selon le contexte du projet serait plus conforme à l’intérêt général. Dans la réglementation thermique, au lieu de fixer un objectif (réduction de la dépense d’énergie) on impose des solutions techniques, au détriment de solutions plus intéressantes pour l’habitant. Par exemple on fixe une proportion maximale de surfaces vitrées, alors que l’on sait faire aussi efficace avec des baies vitrées plus généreuses, pour des logements plus lumineux. Résultat : nos nouveaux immeubles ressemblent à des bunkers. De même pour chauffer un bâtiment très performant, seuls 6 jours d’utilisation de chauffage électrique seraient nécessaires. La réglementation ne le permet pas ce qui conduit à avoir recours à une coûteuse chaudière à bois pour 6 jours d’utilisation par an.

Une plus grande liberté d’adaptation selon le contexte du projet serait plus conforme à l’intérêt général.

Les procédures pour la réalisation d’un projet sont multiples et imposent des délais de plus en plus longs, et des coûts supplémentaires. Sous l’effet de lois et décrets successifs, les deux dernières décennies ont vu se multiplier le nombre d’intervenants chargés de contrôler et certifier tous les aspects de la construction. Ceci conduit à une dilution des responsabilités et à une approche plus juridique que professionnelle des projets. Le principe de l’assurance « garantie décennale » obligatoire, typiquement français, est aussi facteur de déresponsabilisation et freine l’innovation. Une harmonisation européenne dans ce domaine permettrait de libérer les talents.

LA LEGISLATION SOUS LE COUP DE L’EMOTION

Derrière cette défiance se cache aussi la peur: peur du procès, peur de l’opinion publique. Les squares parisiens sont fermés aux familles en cas de neige « pour des raisons de sécurité ». Chez nos voisins, ils restent ouverts, on recommande simplement aux familles de faire attention à leurs enfants….

L’émotion ressentie dans l’opinion par un fait divers conduit trop souvent à faire des lois dans la précipitation et sans étude d’impact, alors que ces études sont obligatoires de par la loi. Il n’y a pas non plus d’évaluation a posteriori des impacts d’une loi en vue d’en corriger les défauts.

Ne peut-on faire confiance aux utilisateurs et leur laisser le choix selon leur mode de vie et leur budget ?

La confusion est grande entre les exigences de sécurité et les normes de confort. Pour obtenir le branchement au réseau électrique par exemple, il faut justifier de la présence d’une prise de téléphone et internet par chambre. Ne peut-on faire confiance aux utilisateurs et leur laisser le choix selon leur mode de vie et leur budget ? On atteint l’absurde dans les parties du territoire qui n’ont pas accès à internet.

Un bâtiment est une globalité, il ne peut être une simple addition de règles et de normes. Les normes d’accessibilité pour les handicapés font parfois obstacle à des solutions architecturales qui répondent au besoin à un coût moindre et avec une meilleure qualité du logement

EN CONCLUSION : FAISONS CONFIANCE

L’amélioration de la situation passe par le passage d’une logique de défiance et de peur à une logique de confiance, qui doit d’abord reposer sur la responsabilité des professionnels concernés.

Sur tous ces sujets et bien d’autres, un excellent rapport a été remis il y a peu sur le bureau de la ministre du Logement, de l’Egalité des territoires et de la Ruralité , Mme Sylvia Pinel. Il reste à mettre en œuvre ses propositions.

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