Aujourd’hui, je n’ai pas le temps !

7 Juil, 2020 | PHILOSOPHIE

Docteur en Philosophie, Pierre d’Elbée intervient depuis plus de 20 ans dans les organisations professionnelles et associatives. Il cherche à établir des ponts entre le monde du travail et la philosophie, trop souvent cantonnée à un domaine académique. Ci-dessous, il rappelle quelques grandes lignes pour mieux “gérer” son temps.

Je suis à la bourre…

Aujoud’hui je n’ai pas le temps d’écrire mon billet mensuel. En général, je m’y prends à l’avance ; je commence par explorer l’actualité, je finis par choisir un sujet, j’essaie de me documenter, je ponds un brouillon, je le reprends plus tard, ma chère et tendre le relit (indispensable et terrible relecture) et je réécris. Processus patient et sinueux. Aujourd’hui, je n’ai pas le temps. Mes dossiers m’attendent, mes clients surtout. Le plus incroyable, c’est que je n’arrête pas de parler de gestion du temps. En coaching comme en séminaire, c’est ce thème qui revient le plus souvent. Je n’arrête pas d’intervenir à ce sujet, j’aide les gens à réfléchir sur leur rapport au temps, et en plus, ils ont l’air content ! Mais aujourd’hui, c’est moi qui panique… S’ils savaient ! Je me sens à la limite de l’imposture ! Et pourtant il faut bien que je l’écrive ce billet mensuel ! J’ai même des lecteurs sympas qui me disent qu’ils y prennent plaisir ! Alors en piste.

Mettre un pas l’un devant l‘autre

Bon, pas de panique. Sans faire comme d’habitude, reprenons les choses une par une. Tiens ! Et si j’écrivais sur le temps. Au moins cela me donnerait l’occasion de m’améliorer. N’y a-t-il pas quelqu’un qui ait déjà écrit sur ce sujet ? Philosophie et gestion du temps dans les entreprises. Cherchons sur Google. Tiens ! Julie Duperray sur le site La pause Philo : L’homme et la maîtrise du temps. Lisons… Pas mal. Et même : Bien. Bon, chers lecteurs, c’est avec grande humilité – et gratitude pour Julie – que je vous offre trois de ses perles, avec – quand même ! – un commentaire personnel. 

1. « Ce que l’on fait de notre temps, c’est ce que l’on fait de notre vie »

Le temps que l’on passe à une œuvre ou à un service nous formate. On passe son temps à travailler ? On devient travailleur. À jouer de la musique ? On devient musicien. À faire du business ? On devient business man. À penser ? Penseur… Je trouve remarquable l’expression « consacrer du temps à ». C’est une façon de comprendre que le temps révèle au plus haut niveau, ce que l’on finira par devenir.

2. « Quitter un rapport au temps « inconscient » pour retrouver un rapport au temps réel, au temps intime… »

On est inconscient de son temps quand on le subit, quand il se déroule mécaniquement, alors même qu’on se rend compte que l’on ne tiendra pas les délais. Nous sommes alors possédés par le temps qui pourtant nous ignore. Que faire ? Un surplus d’énergie pour une prise de conscience peut s’avérer libératoire : Qu’attend-on de moi ? Qu’est ce qui est essentiel à réaliser dans ce temps qui me reste ? Alors peut surgir un raccourci straight to the point : on prend conscience de cet essentiel auquel il faut répondre et qui est possible. 

3. « Pour bien penser il faut avant tout se rapprocher de nos rythmes intérieurs et les laisser nous guider »

Car le temps n’est pas purement objectif. Il dépend aussi de nous, de nos rythmes intérieurs. Nous connaissons les fulgurances et les temps longs, les temps de désert et les temps inspirants. Il y a des moments où il ne sert à rien de forcer. On ne peut pas vivre tout le temps à 100 à l’heure. Le temps est hétérogène, mesuré par la qualité changeante de notre vie intérieure. Notre corps sait souvent des choses que nous ne voulons pas admettre. Il est notre premier associé : faisons de lui un allié, pas un adversaire.

Temps du repos, temps du loisir

Pour terminer, un mot sur le temps de repos : « Le philosophe se veut être un penseur du repos, non pas de la paresse, mais d’une certaine sagesse qui a à cœur de respecter les grands rythmes de la vie dans le temps qui est accordé à chaque individu. » À l’aube de ces vacances, sachons nous arrêter. Le travail est un temps humain, le loisir aussi. En latin, le loisir otium s’oppose à negotium. Il n’est pas seulement un temps de repos pour mieux travailler, mais aussi un temps d’accomplissement plus personnel qui transcende le travail. En prendre conscience est peut-être le début d’un changement dans notre rapport au temps.


Cet article est disponible sur le site d‘Iphae Conseil

Je soutiens le Courant pour une écologie humaine

 Générateur d’espérance