Jusqu’où dénaturer le goût ?

29 Juil, 2013 | CONSOMMATION, ECONOMIE

BonbonsLa consommation est le centre de toutes les attentions : de l’économiste qui mesure le PIB et la consommation des ménages, au consommateur qui scrute son sacro-saint « pouvoir d’achats ». On cherche à pouvoir acheter plus, sans regarder ce que l’on achète vraiment. Qui n’a pas le prix comme principal critère d’achat ? A ce petit jeu nous sommes toujours perdants, car dans nos produits alimentaires bon marché il n’y a plus vraiment de sucre, de fromage, de fraise ou de citron mais des substances synthétiques parfois d’origine pétrolière qui imitent ces goûts pour moins cher et en plus puissant. Le but de ce propos n’est pas de condamner les additifs mais de déplorer le manque de connaissance de la population et donc l’absence de choix.

 

DÉNATURATION DU GOÛT

Ne pensons pas à la parfumerie fine, ce n’est qu’une goutte dans le demi-litre de parfum que nous consommons tous les jours. Les parfums sont partout et nous habituent à des odeurs fortes qui dénaturent nos sens : comme le trop de sucre, le trop de parfum nous fait perdre le sens de la réalité. Ce qui existe aujourd’hui : parfum d’ambiance diffusé dans les boutiques qui séduira nos sens, parfum sur les paquets alimentaires, parfum masquant les odeurs des principes actifs des cosmétiques/détergents… Ce n’est pas pour nous faire plaisir que l’on met des parfums doux dans la cosmétique (c’est vert et nauséabond sans colorant et parfum), ni que l’on met de l’eucalyptus ou des agrumes dans le Pec ! Si nous savions l’odeur décapante du détergent lorsqu’on se passe de parfum !

Pour les arômes dans les biscuits, gâteaux, boissons, sauce, viande … on ajoute des arômes pour « améliorer », « booster », « orienter » nos impressions ! Dopage ou simple ingrédient ?
Par exemple, l’arôme vanille dans le paquet de sucre, l’arôme vanille pour mettre en valeur le chocolat de la tablette, l’arôme fromage dans le gras blanc que nous prenons pour du fromage sur les pizzas.

Mais attention ce n’est pas toujours le méchant industriel contre le naïf client : le consommateur veut aujourd’hui un paquet de gâteaux qui coûte 1€ et qui peut se conserver 1 an. On nous trompe, certes, mais le consommateur demande à être trompé. Qui a déjà cuisiné sait qu’un gâteau ne tient pas plus de deux semaines dans un placard. Comment arriver à une telle stabilité avec du vrai beurre qui pourrit ? Solution : faire des gâteaux sans beurre ! Mais avec un arôme beurre et des conservateurs…

« On nous trompe, certes, mais le consommateur demande à être trompé »

Tous ces exemples pris individuellement se justifient, mais que devient l’homme ? Le goût authentique des aliments disparaît à force de compromis, comme une forêt disparaît à force que chacun remplace un arbre d’origine par du synthétique plus commode.

DISTINGUER CE QUI VIENT DU PÉTROLE ET DU POTAGER

Je suis choqué à l’idée que mon fils puisse un jour se promener dans mon potager et me dire que mes framboises et mes tomates sont moins bonnes que celles qu’il mange à la cantine, et qu’il ne s’agit peut-être pas de tomates car elles ont plein de taches bizarres. Nous n’en sommes pas loin. Je fais en sorte de lui donner chaque jour des légumes, des fruits, des condiments, des céréales. Le moins possible de plats cuisinés. Pour qu’il sache ce qu’est le vrai goût.
Mais je ne suis pas pour autant un ayatollah. Je raffole de bonbons, de sauces toute prêtes, de plats cuisinés bien pratiques. L’arôme ou le parfum a un rôle utile mais à bon escient. La différence entre lui et moi, c’est que je sais ce qui est naturel et ce qui ne l’est pas. On peut manger des plats tout faits, mais cela devient préoccupant quand on ne sait plus ce qui vient du pétrole et ce qui vient du potager. Manger certains bonbons n’est pas un problème, dès lors que l’on a conscience que ce n’est pas naturel. Le problème se pose surtout pour les jeunes générations, dont la mienne.

« Je crois plutôt au bon sens de chacun, par l’éducation »

Il ne s’agit donc pas de condamner le « dopage » dans nos produits de consommation, cela a toujours existé, dans tous les pays et à toutes les époques. Ajouter des épices (curry, cannelle ; sel, poivre …) n’en est-il pas la première étape ? Le principal point est de savoir comment sont fabriqués les produits que nous achetons et savoir prendre du recul vis-à-vis de ceux-ci. Avant de m’en remettre à l’Etat, je crois plutôt au bon sens de chacun, par l’éducation.

RESPONSABILITÉ DU CONSOMMATEUR

L’industriel, la grande surface, le consommateur : tous sont obnubilés par le prix sur l’étiquette.

« Chacun peut donc faire l’effort de consommer moins mais de consommer mieux. »

Le coût des « matières premières » dans un produit alimentaire, cosmétique ou ménager est souvent bien plus petit que ce que les dépenses relatives au marketing, au distributeur, à la logistique ou aux prélèvements de l’Etat, ont coûté. Un doublement du coût de ces « matières premières », lié à l’utilisation de meilleurs ingrédients, ne doublerait pas le prix du produit, mais ne représenterait souvent que 10% de hausse.

Les modes de consommation de chacun comptent. Si plusieurs dizaines de milliers, puis centaines de milliers de personnes consomment plus de telle catégorie de produit, et moins de telle autre, une tendance est créée, qui est scrutée et attendue par les industriels : un mouvement naît pouvant s’appliquer à tous. Et par la suite, les produits recherchés par cette minorité sont mis en avant et proposés à tous.

 

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