Autour de la ruche – Pascale Milliard, apicultrice

11 Déc, 2023 | AGRICULTURE

Après avoir hérité d’un bout de campagne provençale, Pascale Milliard décide de se lancer dans la pratique de l‘apiculture, sans vraiment connaitre le sujet. Une passion – qu’elle vous raconte ci-dessous – naît alors.

Quand l’infirmière devient apicultrice

Pascale Milliard, apicultrice amateur : “Une fois ce bout de campagne hérité, voilà une douzaine d’années, je me suis demandée quoi en faire ; je ne suis pas du tout agricultrice et il s’agissait quand même d’un terrain en zone agricole de 3000m2 ! J’ai finalement eu l’idée de m’intéresser aux monde des abeilles. Au fil des rencontres et des conversations, j’ai suivi un stage d’initiation à la Maison de la Biodiversité à Manosque. J’ai tout de suite été passionnée par la vie des abeilles et leur place dans l’écosystème !

Quand le destin s’en mêle avec le coup de pouce qui va bien

Le hasard a bien fait les choses : en 2012, un essaim impromptu s’est installé sur la fenêtre d’une voisine ; une belle occasion de se jeter à l’eau ! J’ai contacté SOS Abeilles, un service d’apiculteurs bénévoles, qui m’a montré comment récolter l’essaim. En parallèle, ma tante – qui est également apicultrice amatrice expérimentée – m’a conseillée de rejoindre l’école du Groupement Apicole d’Entraide du Garlaban (GAEG) afin d’apprendre à m’occuper de cet essaim (tombé du ciel, on peut le dire) comme il se doit.

À partir de là, j’ai fréquenté un rucher école, qui m’a donné le courage de débuter mon propre rucher avec deux puis trois colonies. Cela m’a permis de faire ma première récolte en 2013 : un des plus beaux jours de ma vie ! Pour quelqu’un qui n’y connaissait rien, c’était un cadeau de la nature : 38Kg d’« une confiture dorée» offerte par nos sœurs les abeilles !

Une colonie d’abeilles, comment ça fonctionne ?

Les abeilles fonctionnent avec un système “matriarcal” : il y a une seule mère, la reine, qui, à la belle saison, est capable pour une seule colonie de pondre plus de mille œufs par jour afin de renouveler les générations d’abeilles.

Une reine vit entre 2 et 5 ans ; une durée plus importante que les abeilles qui, en bonne santé, vivent entre 42 et 120 jours selon la saison. Quand une reine est en fin de vie ou que la ruche est surpeuplée, la colonie décide d’essaimer. En général, c’est entre fin avril et début mai. Un peloton (l’essaim) d’au minimum 20 000 abeilles va donc sortir et quitter la ruche avec sa reine, pour s’installer dans une autre « crèche ». La population restante est alors orpheline.

Comment une colonie se “remère”-t-elle ? Bien avant le départ de la reine-souche, la colonie va produire des cellules royales. Une reine pond des œufs qui ont tous le même capital génétique, que ce soit pour les reines, les ouvrières ou les faux-bourdons (les mâles). Au-delà de 3 jours, selon l’alimentation donné à l’embryon (par les nourricières), l’abeille deviendra ouvrière – femelle ou faux-bourdon – ou une reine en puissance qui ne souffrira pas de cohabitation avec une autre souveraine ! Mais quand la reine prévoit quitter la ruche, ça se sait dans la colonie qui va alors nourrir quelques cellules royales. Une fois qu’elle se sera envolée vers d’autres cieux, la colonie restante se tournera vers les quelques cellules gorgées de gelée royale ; la première qui sortira sera la nouvelle reine. Ouf, la relève est alors assurée !

C’est important de maîtriser l’essaimage, pour ne pas perdre la colonie et qu’une reine puisse toujours succéder à une autre. “Cueillir” les essaims à cette période est magique ; quand je suis dans mon jardin et que j’aperçois une boule noire accrochée à un buisson, je sais que je vais pouvoir ouvrir ma boîte et proposer aux abeilles un nouvel endroit pour s’installer. Elles sont très souvent partantes ! C’est merveilleux.

La cueillette d’un essaim

Nourrir les abeilles

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les abeilles ne sont pas 100 % autosuffisantes. Lorsque les saisons n’offrent que peu ou pas assez de ressources (ce qui est de plus en plus le cas avec les variations météoclimatiques), il est nécessaire de les nourrir si l’on ne veut pas voir nos colonies mourir de faim.

En période hivernale, on utilise de la pâte de fructose (candi), que l’on dispose dans le compartiment de nourrissage de la ruche (nourrisseur). Pour vous donner un ordre d’idée, pour passer l’hiver confortablement en Provence, il leur en faut quelques 6 kilos par ruche. L’été des grandes sècheresses, on utilisera plutôt du sirop lourd glucose/fructose.

Par ailleurs, l’apiculteur peut procéder à un nourrissement de stimulation, lorsque la ponte tarde à démarrer ; il propose alors une petite quantité de sirop dilué pour encourager la colonie à la préparation une miellée prochaine.

Source de l’image : https://www.rossbees.org.uk/varroa.html

Le grand prédateur des abeilles : le varroa

Dans la deuxième partie de l’année, au plus tard vers mi-septembre, si ce n’est juste après les récoltes d’été, il est impératif de traiter les abeilles contre le varroa. C’est un parasite qui s’accroche aux abeilles et se nourrit de leur hémolymphe…

Il est très difficile de s’en débarrasser complètement car ce parasite nait et vit au cœur de la ruche. On peut traiter soit avec des substances chimiques antiparasitaires soit avec des produits plus naturels lesquels peuvent parfois être éco-certifiés.

La Chambre d’agriculture ( GDSA) est généralement de bon conseil concernant la pérennité des colonies et les choix phytosanitaires à poser, que l’on pratique l’apiculture en amateur ou en professionnel.

Un autre prédateur de plus en plus présent – pour lequel tous les apiculteurs déploient moult ingéniosité de pièges – est le Vespa Velutina : le frelon asiatique. Nous aimerions tous découvrir un animal prédateur efficace car si on le laisse se développer, il a le pouvoir de faire s’effondrer nos colonies en quelques semaines seulement.

Quand l’apiculture transforme

Depuis que je me suis mise à pratiquer l’apiculture, mon comportement a changé. Notamment parce que je connais bien mieux l’environnement aujourd’hui.

Un exemple : pour moi, jusqu’alors, le lierre devait être arraché autant que possible ; dans la campagne, il a la réputation (justifiée) d’étouffer les arbres. Mais depuis que je pratique mon activité apicole, j’ai découvert qu’il
était une grande ressource d’automne pour les abeilles : sa pollinisation dure six semaines. Voilà un exemple très concret qui m’a fait changer de regard sur ce qui m’entourait.

Quoi qu’il en soit, je peux vous dire qu’on s’attache à ses abeilles comme à n’importe quel animal de compagnie ! Elles ont leur caractère, en fonction des ruches colonisées. La ruche est la maison de famille des abeilles domestiques, elles ne se trompent jamais d’entrée quelque soit leur nombre !

L’apiculture m’a appris l’humilité. Comme je ne suis pas professionnelle, je ne promets jamais de une quantité précise de miel à qui que ce soit ; cela dépend de trop de paramètres. J’accueille la récolte sans rechigner, car le miel est leur butin pas le mien !

Un conseil quand vous passez près d’une ruche

Quelques conseils pour le grand public : lorsque vous vous promenez dans la campagne et que vous voyez des ruches, ne vous approchez pas à moins de 6 mètres et évitez de vous mettre en face de l’entrée car cela va gêner le trajet des abeilles qui entrent et sortent.

Les abeilles sont de grandes travailleuses, elles ne pensent qu’à ramener des ressources à la ruche (pour les butineuses). À l’entrée de la ruche veillent les gardiennes ; si jamais vous vous approchez trop près, elles vous le feront savoir !

L’essaim de Pascale Milliard

La récolte du miel : un cadeau qui met en joie

Le miel que nous récoltons est un véritable cadeau ; c’est une « vendange » qui parle de toute une année de soins, de fleurs rencontrées…

Le miel que nous récoltons est un véritable récompense ; il signifie que la saison s’est bien passée, que mes abeilles se sont bien portées, qu’elles n’ont manqué de rien et ont donc bien travaillé. Le miel récolté, extrait et mis en pot, dit quelque chose de la fécondité de la nature.

C’est une très grande joie quand je peux partager le fruit de mon activité d’apicultrice en faisant goûter mon miel à mes proches. Le miel fait l’unanimité en famille ; c’est un produit apprécié et fédérateur !”

La récolte du miel


Découvrez notre dernier article autour de l’agriculture : Heureux comme un cochon en forêt : quand les porcs sont élevés en pleine nature

Je soutiens le Courant pour une écologie humaine

 Générateur d’espérance